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Choisir est partenaire du film L'affaire Nevenka d'Iciar Bollain qui sort en salles aujourd'hui !

Choisir la cause des femmes a le plaisir d'être partenaire du film "L'affaire Nevenka" de la réalisatrice espagnole Iciar Bollain qui sort aujourd'hui dans les salles françaises.

 

Avant de pouvoir dire “me too” (“moi aussi”), il a fallu que des voix pionnières s’élèvent pour dénoncer les violences patriarcales. La voix de Nevenka Fernández a été l'une de ces voix pionnières dans l’Espagne du début des années 2000 lorsqu’elle a porté plainte pour harcèlement sexuel contre Ismael Álvarez. Ce dernier est, à l’époque, un politicien de 52 ans, de droite, très populaire et maire de la ville moyenne de Ponferrada (dans la très conservatrice Castille-et-León), qui va être le théâtre de l’enfer vécu par Nevenka, 24 ans. Celle-ci est propulsée adjointe aux finances par le maire qui entend ainsi la rendre redevable de cette promotion. Le film important d’Iciar Bollain donne méthodiquement à voir cet enfer, de ses prémices jusqu’à son dénouement judiciaire qui débouchera sur la première condamnation pour harcèlement sexuel de l’histoire de la politique espagnole. Difficile pourtant de dire que justice a été rendue lorsque l’on sait que Nevenka, conspuée par la société et vilipendée dans les médias de l’époque, a dû s'exiler en Irlande, où elle réside encore, pour vivre en paix. 

Ce film est politiquement important à plusieurs égards. 

On y voit que la décrédibilisation de la parole des femmes est systématique : ici Nevenka serait trop éduquée pour que l’on puisse croire qu’elle est tombée dans l’engrenage du harcèlement. Or, combien de fois n’a-t-on pas entendu la voix de victimes méprisées car celles-ci ne seraient pas assez éduquées ? Lorsque la société est gangrénée par la culture du viol et par une misogynie systémique, la voix des victimes est invariablement discréditée. 

On y voit que pour Nevenka la plainte et la procédure judiciaire lui font subir une "re-victimisation", la font souffrir une seconde fois la réponse apportée à l’infraction pénale faisant re-surgir le traumatisme, comme cela est encore souvent le cas pour les victimes. La violence du procès, retranscrit verbatim dans le film, est sidérante, y compris en tant que simple spectatrice. Pourtant, cette plainte apparaît comme vitale pour Nevenka. 

On y voit surtout le champ de mines que constitue le monde politique pour les femmes qui souhaitent s’y engager. De nombreuses affaires ont montré que les décideurs politiques sont souvent des agresseurs ce qui se reflète dans les lois mais aussi dans les dynamiques au sein des partis et des administrations. Le calvaire de Nevenka a ceci de particulier qu’il est implanté dans la sphère politique locale. Ce pouvoir local dont jouissent les maires leur donne accès à des passe-droits (logement, emploi, etc.) qui leur permettent d’exercer une pression sur leurs concitoyen·ne·s tenu·e·s, en retour, de leur obéir au sein d’un système où le silence et l'intimidation sont la norme. Il s’agit d’un pouvoir qui donne précisément les moyens d’agresser. Ce monde politique s’inscrit dans une parfaite continuité avec la dénommée société civile et sa consubstantielle domination des hommes sur les femmes. En politique, et c’est ce que le film démontre, s’y ajoute un élément hiérarchique analogue à celui entre un·e salarié·e et son employeur propice à créer une emprise psychologique. C’est précisément l’engrenage de l’emprise que nous donne à voir l’histoire de Nevenka. Son bourreau est méthodique car l’emprise découle d’une véritable ingénierie dont le harcèlement et la violence sont des éléments essentiels.

 

Soyons nombreux·ses à soutenir ce film en salles !

 

Ana Cuesta